RDC : Le ministère public requiert 20 ans de prison contre Matata Ponyo et coaccusés

La cours constitutionnelle de la République démocratique du Congo a annoncé ce mercredi 23 avril 2025 qu'elle rendra son verdict le mardi 14 mai prochain dans l'affaire très médiatisée de Bukanga Lonzo. Ce procès oppose l'ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo, l'ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC) Deogratias Mutombo, le patron d'Africom Grobler Kristo, ainsi que d'autres prévenus, au ministère public. L'annonce du calendrier judiciaire a été faite lors de l'audience du jour, qui s'est déroulée en l'absence remarquée des principaux accusés.

Au cours de cette audience, le ministère public a exposé ses réquisitions, demandant une peine d'emprisonnement de vingt (20) ans pour l'ensemble des prévenus. De manière spécifique, le ministère public a également requis une peine de dix (10) ans d'inéligibilité à l'encontre de l'actuel député national Augustin Matata Ponyo, une demande qui, si elle était acceptée par la Haute Cour, aurait des implications politiques majeures.

L'absence de l'ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo lors de cette audience n'est pas passée inaperçue. Par le biais de ses conseils, Monsieur Matata Ponyo a fait savoir à la Cour Constitutionnelle qu'il persistait dans sa demande de voir la Haute Cour se conformer à la requête formulée par l'Assemblée Nationale. Cette requête de la Chambre basse du Parlement visait à obtenir la levée de ses immunités parlementaires, une procédure que la défense de l'ancien Premier ministre estime indispensable pour la régularité de la procédure judiciaire à son encontre.

En réponse à cette position, le président de la Cour Constitutionnelle, le professeur Dieudonné Kamuleta, a pris la parole pour rappeler solennellement à l'Assemblée Nationale le principe fondamental de l'indépendance du pouvoir judiciaire, consacré par la Constitution de la République. Le président Kamuleta a clairement indiqué que la Cour Constitutionnelle n'avait pas reçu notification d'une quelconque décision ou prise de position formelle de la part de l'Assemblée Nationale concernant cette affaire.

« La Cour n’a pas connaissance d’une quelconque décision ou prise de position de l‘Assemblée nationale. Les députés peuvent parler, ils sont libres. Mais l’institution Assemblée nationale n’a pris aucune position, aucune décision parce que étant le sanctuaire de la démocratie, l’Assemblée nationale sait très bien que la teneur de l’article 151 de la constitution ne permettrait pas une telle position. L’indépendance du pouvoir judiciaire est consacrée et l’interaction entre institutions doit être respectée. Cet article dit très bien que l’Assemblée nationale ne peut ni donner d’injonction au pouvoir judiciaire, ni interférer dans les procès en cours », a déclaré avec fermeté le président de la Haute Cour.

Dans la foulée de ces clarifications, le président Kamuleta a également annoncé que l'élu de Kindu, Augustin Matata Ponyo, serait jugé par défaut en raison de son absence persistante et du refus de comparaître devant la juridiction suprême en matière constitutionnelle. Cette décision de la Cour Constitutionnelle de poursuivre la procédure en l'absence du principal accusé souligne sa détermination à faire avancer le dossier Bukanga Lonzo conformément à la loi.

Pour rappel, cette affaire complexe et aux enjeux économiques considérables porte sur la gestion du projet du parc Agro-Industriel de Bukanga-Lonzo, une initiative lancée sous la primature d'Augustin Matata Ponyo. Un rapport accablant de l'Inspection Générale des Finances (IGF) avait qualifié ce projet d'échec « désastreux » pour le trésor public, estimant les pertes à plus de 287 millions de dollars américains. Le rapport de l'IGF désignait nommément l'ancien Premier ministre Matata Ponyo comme étant « l’auteur intellectuel, matériel et principal » de cet échec retentissant ainsi que des détournements de fonds qui auraient eu lieu dans le cadre de ce projet.

L'annonce imminente du verdict de la Cour Constitutionnelle le 14 mai prochain marque un tournant décisif dans cette affaire qui a captivé l'attention de l'opinion publique congolaise pendant plusieurs années. Les réquisitions sévères du ministère public, combinées à la posture de défi de l'ancien Premier ministre et à la position ferme de la Cour Constitutionnelle quant à son indépendance, augurent d'une décision judiciaire lourde de conséquences, tant sur le plan juridique que politique. La nation congolaise attend avec une grande anticipation le verdict de la plus haute juridiction du pays dans ce dossier emblématique de la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des fonds publics.

Guillaume Noy Amisi/Radio Ndenga News via Actu-Service

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